La fiscalité en débat (II): le choix « utile » des classes moyennes supérieures (*)

Au commencement, il y a cette sorte de malentendu, d’erreur communément partagée sur l’identité et le programme (espérés, idéalisés, fantasmés?) du futur Président, celui qui s’était présenté comme le candidat d’un vrai changement, celui du « Je vous ai compris » (même des Gilets jaunes de la première heure y ont cru!) pour, dès le lendemain de l’élection, prôner et mettre en œuvre avec ostentation une « politique du ruissellement » controversée… Et en enfilant, au fil des jours, quelques perles « antisociales » de nature à sérieusement malmener le consensus.

Et ça continue. A preuve, le cadre des contributions au Grand débat (Grand débat.fr) bien verrouillé par des items et des questions fermées qui ont clairement pour objet de prévenir toute velléité de réforme systémique de l’appareil socio-fiscal. Un peu plus, on avait droit à des questions du genre : « Voulez-vous diminuer la TVA sur la baguette de pain ? »!

Tout se passe comme si le mot d’ordre était de préserver coûte que coûte l’édifice socio-fiscal actuel avec son opacité, ses privilèges et inégalités les plus flagrantes, en cédant toujours plus pour calmer la grogne, en distribuant une allocation par ci, une exonération par là. Déjà 10 milliards d’euros octroyés et financés par la dette…(1) Tout cela pour calmer –provisoirement– des ressentiments alimentés en continu par des écarts et des inégalités trop marqués et inexpliqués. Faute d’y répondre, le mouvement des gilets jaunes continuera…L’impasse guette.

Et en attendant, comme l’on sait que les trop riches seront toujours bien placés pour faire entendre leur voix, comme l’on pressent qu’ils ne seront pas assez nombreux pour répondre aux attentes des trop nombreux pauvres et qu’il ne faut surtout pas décourager leur vocation à faire « ruisseler » leur richesse pour le profit de tous, que va-t-il se passer ? Le scénario est déjà écrit…et la principale variable d’ajustement–en clair, la classe moyenne supérieure– d’ores et déjà désignée (2). Autant dire qu’il ne lui reste, à défaut d’empathie, d’autre choix rationnel que d’endosser in petto le fameux gilet jaune et tenter d’obtenir que s’engage, au plus vite, une revue d’ensemble du système socio-fiscal. Afin d’y mettre plus d’équité, seule façon d’interrompre le cycle sans fin des concessions et d’apporter des réponses cohérentes et durables aux multiples (et souvent contradictoires) expressions du malaise actuel. (3)

 (*) Ce sera ma dernière incursion dans le champ de la fiscalité ; une incursion inattendue mais liée à une actualité qui a fait converger fiscal et social de façon inédite.

(1) selon l’évaluation officielle du coût des annonces du Président de la république en fin d’année 2018 en faveur du pouvoir d’achat

(2) Il n’existe pas de définition objective de la classe moyenne supérieure ou aisée ; on peut se référer utilement à l’analyse de l’Observatoire des inégalités : «  Le niveau de vie des classes moyennes est situé entre 1 265 et 2 275 euros par mois pour une personne seule, entre 2 500 et 4 420 euros pour un couple et entre 3 300 et 5 740 euros pour un couple avec deux enfants. Les catégories aisées se situent au-dessus de ces niveaux. Si on fixe le seuil de richesse au niveau du double du revenu médian, on devient riche à partir de 3 125 euros mensuels pour une personne seule, 6 000 euros pour un couple et 8 000 euros pour une famille avec deux enfants. » (Source : https://www.inegalites.fr/Riches-pauvres-et-classes-moyennes-comment-se-situer?id_theme=15 )

(3)  Voir mon article précédent du 20 janvier 2019, intitulé: « Fiscalité: avec deux grands principes constitutionnels, à la recherche du consensus perdu».


Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s